Syndrome de KISS

Le « syndrome de KISS » ou « KISS syndrom »: éléments de réflexion 

Avant propos

Cette page est le fruit de notre réflexion personnelle, appuyée à la fois par notre expérience en cabinet, par de nombreux échanges avec des confrères, et par la littérature internationale que nous avons pu parcourir (notamment à travers notre rôle de directeur de mémoire) sur le « syndrome de KISS ». C’est un sujet qui fait polémique, qui n’est pas reconnu scientifiquement par la communauté médicale/pédiatrique, et dont on parle de plus en plus ces dernières années. Nous souhaitons ici apporter des éléments de notre réflexion sur ce sujet (cette page est mise à jour régulièrement en fonction de notre expérience quotidienne avec les enfants).

« Syndrome de KISS » : définitions

Nous allons tout d’abord présenter ce syndrome tel qu’il est défini dans la littérature, par H.Biedermann notamment, médecin et chiropracteur allemand, qui a été le premier a parlé du « syndrome de KISS », dans la suite des travaux de G. Gutmann.

C’est un acronyme allemand : « Kopfgelenk Induzierte Symmetrie Störungen », soit « Troubles de symétrie induits par les vertèbres cervicales supérieures » en français, ou encore « kinematic imbalances due to suboccipital strain » en anglais.

Le syndrome de KISS est décrit comme étant l’existence de troubles fonctionnels des vertèbres cervicales supérieures (haut de la nuque), notamment C0-C1-C2 soit occiput-atlas-axis.

Concrètement, il s’agirait d’un « blocage » (qui pourrait prendre différents formes, par exemple une translation, une rotation, une subluxation) des vertèbres cervicales supérieures (notamment l’atlas-C1), en général dû à des contraintes in-utéro et/ou lors de l’accouchement, associé à plusieurs symptômes (rappelons qu’un « syndrome » est simplement un ensemble de symptômes).

Bien que les symptômes sembleraient variables d’un enfant à l’autre car le blocage et les tensions qui en découlent varient selon les enfants, il existe 2 types qui sont décrits dans la littérature, qui est très faible sur le sujet à ce jour. Voici ce qui est décrit (nous ne faisons ici que citer la description de Biedermann) :

Type 1 : Inclinaison latérale

La tête, la colonne et le bassin de l’enfant décrivent une posture fixée comme un « C ». Cela entraîne donc différentes asymétries :

-au niveau de la tête : aplatissement de l’arrière du crâne type plagiocéphalie puisque l’enfant a la tête tournée souvent du même côté,

-du visage : un oeil peut être plus fermé que l’autre, la mâchoire peut être décalée, les oreilles peuvent être décalées,

-des membres supérieurs : les bras ne sont pas forcément utilisés de manière symétrique,

-de la colonne qui décrit un « C » comme si l’enfant présentait une scoliose,

-du bassin et des membres inférieurs : les jambes comme les bras peuvent ne pas être utilisées de manière symétrique. Il peut y avoir une asymétrie du pli fessier (raie des fesses, et jonction entre fesses et cuisses également).

Type 2 : Hyperextension ou « opisthotonos »

Dans ce cas l’enfant n’est pas vraiment asymétrique. Il présente une posture fixée en hyperextension de la tête et de la colonne vertébrale, c’est-à-dire qu’il se cambre et jette sa tête en arrière (en extension). Il peut présenter une déformation crânienne également, mais cette fois-ci souvent symétrique (type brachycéphalie : aplatissement postérieur global du crâne, du au manque de rotation de la tête sur le côté).

L’enfant semble hypertonique, tendu, n’aime pas être sur le dos, et parfois n’aime pas être sur le ventre non plus (il « fait l’avion » avec les bras et les jambes en l’air).

 

=> Dans les 2 types, le développement psycho-moteur de l’enfant pourrait être perturbé, lors du ramper, du quatre pattes, de la station assise, de la marche, de la préhension, de la motricité fine…

L’enfant est également irrité, fait des crises de pleurs fréquentes qui témoignent de son inconfort, présente des troubles du sommeil et de l’endormissement, des troubles digestifs (reflux ou RGO, coliques, constipation), des troubles de la succion (difficulté à prendre le sein voire le biberon, avec des fausses routes).

Tous ces symptômes seraient liés notamment à la complexité de la zone cervicale supérieure, où sont présentes des structures importantes :

-le nerf vague (X) qui innerve les poumons, le cœur et le système digestif ;

-les nerfs responsables de la succion déglutition (nerfs IX glosso-pharyngien et XII hypoglosse) ;

-le nerf responsable de l’innervation d’une partie des muscles du cou (nerf XI accessoire) ;

-les vaisseaux (artères et veines) qui irriguent et drainent le cerveau.

Le traitement du « syndrome de KISS » consisterait à réaliser une manipulation forcée, unique, de haute vitesse et de faible amplitude, sur les cervicales supérieures de l’enfant.

Ce genre de manipulation, même réalisé par un praticien expérimenté, n’est pas sans risque pour l’enfant, et est fortement critiqué et déconseillé par les sociétés savantes médicales, pédiatriques, et ostéopathiques.

Notre avis sur la question

D’un point de vue scientifique, il n’y a pas de consensus ni sur l’existence de ce syndrome, ni sur le diagnostic, ni sur le traitement. Nous faisons des recherches de la littérature sur le KISS Syndrom depuis plusieurs années, et nous traitons des dizaines de cas par mois de nourrissons qui rentreraient dans la catégorie « syndrome de KISS » selon sa description, nous allons donc expliquer ce que nous en pensons, en lien avec notre expérience au cabinet.

Précisons que le syndrome de KISS tel qu’il est décrit induirait fréquemment une déformation crânienne type plagiocéphalie ou brachycéphalie, ce qui est notre domaine de prédilection et que nous traitons tous les jours au cabinet, et c’est cela qui nous a amené à voir des cas qui entrent dans la définition du « syndrome de KISS », et donc à approfondir nos recherches, pour aujourd’hui bien comprendre le concept et surtout traiter les nourrissons concernés.

Selon nous, et comme nous l’expliquons toujours aux parents depuis quelques temps, il est inutile et anxiogène d’employer ce terme « syndrome de KISS » pour catégoriser un enfant, ce n’est pas une maladie, ni un syndrome reconnu. L’essentiel est de diagnostiquer et de traiter les différentes restrictions de mobilité dans le corps de l’enfant, notamment au niveau des cervicales supérieures, mais pas uniquement, et c’est ce que nous faisons tous les jours en cabinet. Il convient donc à la fois de prendre le problème et les symptômes au sérieux car ils existent et peuvent être importants, mais aussi de dédramatiser sur l’existence d’un « syndrome », qui peut être anxiogène et effrayer inutilement les parents d’une part, et d’autre part cela amène à enfermer l’enfant dans « une case », ce qui est de plus en plus fréquent chez les enfants, et cela ne les aide pas forcément.

En pratique, beaucoup de nourrissons présentent des symptômes qui peuvent s’apparenter au Syndrome de KISS. Ces symptômes peuvent être très difficiles à supporter tant pour l’enfant que pour les parents. Le parcours des parents est souvent difficile, et leur récit est souvent similaire: ils sentent que leur enfant a « quelque chose qui ne va pas » sans que l’on puisque l’expliquer, alors qu’il semble en bonne santé par ailleurs.

Ces enfants ont en effet souvent des blocages et tensions dans tout leur corps, et notamment au niveau des cervicales supérieures, pouvant être en lien avec les symptômes.

Mais heureusement, tous les nourrissons n’ont pas besoin d’une manipulation forcée pour être traités, contrairement à ce qui peut être dit sur ce sujet. Chez la grande majorité des nourrissons que nous recevons, nous arrivons sans manipulation forcée, mais par des mobilisations douces, conformément aux décrets sur l’ostéopathie, et dans le respect de l’enfant, à traiter les blocages présents et donc les symptômes qui en découlent.

Bien sûr, il y a des nourrissons que nous ne pouvons pas toujours soulager uniquement par l’ostéopathie, notamment parce qu’il peut exister des facteurs associés (intolérance aux protéines de lait de vache, pathologies associées…). Dans ces cas, nous travaillons en complémentarité avec le médecin/pédiatre qui suit l’enfant, et nous orientons régulièrement vers d’autres praticiens lorsque c’est nécessaire (kinésithérapeutes, psychomotriciens…).

En conclusion

Nous pensons que les symptômes décrits dans le syndrome de KISS sont bien réels, nous les constatons tous les jours en cabinet. Ils peuvent être dus (au moins en partie) à des restrictions de mobilités (ou « blocages ») notamment au niveau des cervicales, et aussi dans tout le corps de l’enfant, amenant parfois l’enfant dans des postures/positions spécifiques (la position en hyperextension par exemple).

En revanche, il n’est pas utile d’employer ce terme « syndrome de KISS » auprès des parents, puisque cela n’est pas reconnu et même critiqué, que cela peut être anxiogène pour les parents (pour rappel un syndrome n’est pas une maladie, mais juste un ensemble de symptômes), voire parfois « marketing » (cf articles de l’ordre des kinésithérapeutes ici, et de la SEROPP ici). Un nourrisson qui présente ces symptômes ne nécessite pas un traitement particulier à base de manipulations potentiellement dangereuses. Il faut simplement repérer les restrictions de mobilité (blocages) et les traiter, en respectant la tolérance de l’enfant, et c’est ce que nous réalisons tous les jours au cabinet, avec si besoin une complémentarité avec d’autres professionnels (notamment kinésithérapeutes, psychomotriciens…).

 

Réponses à vos questions fréquentes

Nous sommes souvent contactés pour répondre à ces questions, c’est pourquoi nous donnons la réponse directement ici pour plus de facilités :

-faites-vous le diagnostic et le traitement du « KISS » ?

Comme vu sur cette page, le syndrome de KISS n’est pas reconnu et même critiqué, donc nous n’employons pas ce terme auprès des parents. En revanche, nous traitons tous les jours des nourrissons qui présentent les symptômes décrits dans le « syndrome de KISS », et ce sans réaliser de manipulations, car ce n’est pas nécessaire, et potentiellement dangereux. En cas de besoin, nous orientons aussi les parents vers des confrères afin de potentialiser le traitement (kinésithérapeutes, psychomotriciens…)  ;

-quelles techniques utilisez-vous ?

Des mobilisations douces dans le respect de l’enfant et de ses articulations (cervicales entre autres) qui rappelons-le ne sont pas encore bien formées et sont donc fragiles. Les manipulations forcées, que nous ne pratiquons pas et qui nous sont interdites par la loi, ne sont pas nécessaires et heureusement car elles ne sont pas sans risque pour l’enfant ;

-combien de séances sont nécessaires ?

Tout dépend des enfants, de l’âge…Parfois une séance peut suffire pour traiter les blocages et améliorer les symptômes, et parfois 2 à 3 séances peuvent être nécessaires, rarement plus.